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Textes du ballet 2006 de l'Association "Sous le Signe de la Danse" : textes écrits et dits en voix-off par votre serviteur, les 9 et 10 juin derniers au Quartz de Brest (1600 personnes). Public très réactif (hilare jusqu'aux applaudissements sur le texte du Jazz, et profondément concentré pour la seconde partie zen).

Le P'tit Poèm' stressé

Pour les zenfants (spécialement pour ceux de l'école de Saint Paul de Varces) :
un escargot, une laitue, un jardinier...

deux histoires courtes de 2002 : les tomates cerises, l'avancement

un des ces poèmes lucides qui vous tombe on ne comment ni d'où : accouché le 26/05/2005 à Roscanvel...

un jardin extraordinaire et Roméo et Juliette (Et Pourquoi Pas ?)
écrits pour le spectacle d'Yvette Maguérès (chorégraphe et très chère amie),
" Et pourquoi pas ? ", donné les 17 et 18 juin 2005 au grand théâtre du Quartz, à Brest.
Textes dits en voix off par l'auteur :o) (en octobre le son témoin du spectacle)
un texte mis en voix et en musique pour Brest 2004 (juillet) "Mer et Paix"
voilà comment j'écris
LA NUIT DANS TOUS SES ETATS

Ballet Jazz de Clarisse Pont – Texte de Thierry Cohard

 

Bonne nuit

Ce soir, les Ballets de Minuit vous présentent " La nuit dans tous ses états ", un spectacle de Clarisse Pont. La jeune chorégraphe, à peine sortie de l’enfance, revisite la mythique histoire de Roméo et Juliette, avec un rien de poupée Barbie et de Ken, légèrement teinté de West-Side Story…

La scène d’exposition nous emmène dans l’intimité d’un couple à l’heure du coucher.

Lui, Georgio, type italien, 1 mètre 90, 85 kilos de muscles est maçon à la ville.

" - Salut ! c’est moi, Georgio, type italien, 1 mètre 90, 86 kilos de muscles, maçon à la ville "

Elle, Cindy, belle comme une héroïne de conte de fées, 90-60-90, est danseuse de cabaret de son état.

" - Bonsoir, moi c’est Cindy ! Je suis belle comme une héroïne de conte de fées ! Des mesures à ma démesure : 90-60-89 et demi. Je suis danseuse de mon état… et j’aime, j’aime le beau Georgio ! "

Le couple va se coucher :

Elle : " - Bonne nuit mon nounours ! N’oublie pas de mettre le réveil matin ! sinon tu seras en retard au travail et ton patron ne sera pas content ! "

Lui : " - Pas d’ennui, ma nénette ! Euh ! le réveil… je le mets où ? "

Ainsi commence notre histoire. Et nous tremblons que la nuit porte à ce si merveilleux amour, un coup fatal…

 

La peur dans la ville

Deuxième scène : danger ! La ville, la nuit, si vile nuit à la vie civile. Des loubards partout, comme des toutous, sortant des bars, montrent les dents comme des loups.

Georgio, malgré son mètre 90, ses 86 kilos de muscles (" - 87 ! ") et sa maçonnerie a peur :

Georgio : " - Oui, en effet, je ne suis pas très rassuré… "

 

La rencontre mouvementée

C’est la nuit, la banlieue, un gang ; et son petit chef s’en prend à Georgio :

" - Aboule un peu la came, rital, file la monnaie ! Sinon j’te r’fais ton brushing à l’envers… Alors t’exécute ? "

Georgio ne sait que faire : se battre ou se tirer ?

Alors, heureusement, le destin qui préside aux destinées destine : Georgio avise une meuf ; une chouette poupée ! C’est la sœur du chef de la bande, il comprend. Cindy, que désormais il appellera sa " Nénette " est la femme de sa vie.

Cindy : " -Fredo, mon bon frérot, laisse-moi vivre ma vie ! J’aime le beau Georgio ! Laisse-moi partir avec lui ! "

Bing ! Bang ! Boum ! Pif ! Paf ! Pouf !

On s’envoie des torgnoles comme un pizzaïolo à sa pâte à pizza…

A la fin, Georgio, le bel italien et Cindy, son amie nénette, s’enfoncent seuls et amoureux dans le silence de la nuit bleue.

 

La soirée Salsa

Alors Cindy dit : " - Viens, mon bel italien ! Viens je t’emmène… dans le monde merveilleux de la nuit ! Ce soir, il y a une soirée… Salsa. On y dansera la Salsa ! "

" - La Salsa ? C’est sale ? c’est ça ? "

" - Que nenni, mon nounours ! c’est la danse sensuelle par excellence exquise ! j’te présent’rai mes copines… "

C’est ainsi que Georgio, le bel étalon italien, s’étala sans télé sur la salsa sensuelle, et la non moins sensuelle, Amanda – la copine ! Ah ! Amanda ! la si sensuelle amande amère de cette belle histoire d’amour entre Cindy et lui, Geogio !

 

La soirée Pyjamas

" - Georgio ! Et si on se faisait une soirée de pyjamas ! On inviterait nos amis que l’on aime. Je mettrai ma nuisette de nuit ! "

" - Ah ! que c’est une bonne idée, ma nénette ! j’aime vraiment beaucu quand on invite ici les amis que l’on aime et quand tu mets ta nuisette de nuit ! "

 

La soirée Disco

Le lendemain Georgio, musclé, courbaturé, ne veut pas être en reste : sa jolie nénette il a invitée à une soirée de disco.

" - Le disco, ça te tourne la tête ! Comme il est écrit dans le titre du tube des blue-jeans : Ca tourne des nattes ! Feu vert ! "

La danse est effrénée ; la Cindy survoltée ; et le Georgio courbaturé. Il veut rentrer. Elle ne veut pas. Elle et son 90 B ; 88 kilos de muscles de son côté… Et forcément, ils sont rentrés.

 

La soirée Cabaret

Enfin c’est le jour J, le D Day, Day J, le D J ! La soirée Cabaret, le grand soir du spectacle dans lequel Cindy danse dedans. Toutes ses copines danseuses de Cabaret sont là. Et comme elles sont affriolantes, Georgio est tout affriolé ! " - Ah que je suis affriolé ! "

Et en effet, avec l’arrivée de la si sensuelle Amanda, la scène d’opérette du deux va tourner en vinaigrette à trois !

Amanda l’aguicheuse, la mauvaise copine, la nympho-derche, la vamp hardie aux yeux de braise, 06-86 / 91-59-88 et demi, la rivale a pris le beau ravioli pour unique objet de son brûlant désir et ses lèvres frôlent en les attirant comme un puissant aimant les lèvres de Georgio qui est éperdument séduit.

Paf ! la baffe ! Clac ! la claque ! Cindy tout feu tout flamme et toute jalousie a réagi.

Georgio n’a pas eu mal, mais il est atteint dans sa dignité de mâle. Il le dit à Cindy : " Je suis tatteint dans ma dignité de mâle ! "

" C’est tant pis pour toi ! " lui répond Cindy. " Tu m’a prise pour une pomme ! et tant mieux si ma tarte t’atteint ! "

Voilà, le drame est noué ; la rupture est consommée.

 

La colère

Cindy ne veut plus entendre parler de Georgio. " Je ne veux plus entendre parler de Georgio ". Il l’a trahie. " Il m’a trahie ! " Il s’est montré indigne de son amour si pur, sinon par action, sinon par omission, du moins par étourdition, il a trompé sa nénette jolie dans les bras tentaculistiques de l’ignoble sangsue d’Amanda. Les amis de Georgio intercèdent pour lui auprès de la douce Cindy, mais en vain, quand le carrosse redevient citrouille, quand les laquais sont des souris, après minuit, elle les repousse avec la plus grande fermeté. Les amis de Georgio se sont vite lassés d’intercéder sans suite pour cette cause si perdue… Elle ne l’aime plus ; c’est dit ; c’est fait : il est fini.

 

Errance

Il est cinq heures ; Paris s’éveille. Les balayeurs n’ont plus sommeil. C’est normal ils ont bien dormi. A leur réveil, les balayeurs balayent Paris comme d’autres prennent un café crème à presque deux euros et demi – il est cinq heures et un demi !

Dans un parc, effondré, le bel italien se lamente : il est trop con-trit de la perte de son ex. Bouhouhou ! un kleenex. S’il pouvait prendre du typex et effacer l’odieux baiser qu’il a donné à l’Amanda ; Bouhouhou ! un kleenex ! Il pense : " Dura lex, sed lex ! " Bouhouhou ! un kleenex ! Après tout c’est qu’un réflexe… Bouhouhou ! un kleenex ! Elle est du genre qu’un rien vexe ! Bouhouhou ! un kleenex ! Tout ça pour une histoire de sexe ! Et même pas ! Bouhouhou ! Oh ! plus de kleenex.

 

Le cauchemar

Epilogue

" - Georgio ! nounours ! allez ! debout ! Tu vas encore être en retard à ton boulot ! "

" Aaaaaatends que je me réveille ! ma nénette ? C’est toi Cindy ! Je croyais t’avoir perdue ! J’ai fait un affreux cauchemar ! Ecoute je vais te raconter ! "

 

CLAIRS OBSCURS

Ballet d'Yvette Maguérès - Texte de Thierry Cohard

 

Ridicules…

Eh bien oui ! C’est comme ça !

Il y a d’un côté les bons sentiments,

De l’autre, les mauvais.

Le clair, l’obscur ;

Le beau, le laid ;

Le pur, l’impur ;

Le noir, le blanc.

Chacun choisit son camp :

 

A ma droite, souriant béatement,

Les apôtres du Bien,

Les saints,

Les Saintes-Nitouche de la Vertu

Les coincés du… moralement correct

Les roquets de la loi,

Les très prudes, les très innocents,

Les très actifs et les très très bien-pensant ;

Toutes gens d’honnêtes valeurs

Qui nous barbent à longueur de temps

De " Fais pas ci, pas ça, pas bien ! "

Les donneurs de leçon, les gardiens

Les matons du temple d’airain !

 

De l’autre côté - à ma gauche donc -

Qui ricanent sournoisement,

Les mauvais garçons, les vilaines filles,

Les anges noirs de l’incorrect,

Les hydres du mal,

Les pros du bancal,

Les pitbulls aux dents acérées,

Les armées de l’ombre,

Les petites frappes, les voleurs, les délurées,

Les voraces de la vie d’ordure,

Les raclures,

Les vraiment méchants.

Toutes gens de mauvais penchants

Qui détournent

A longueur de temps

La droite ligne de conduite

Que les bons roquets ont fixée

Pour la vie saine en société.

Tous les fauteurs, les trublions,

Les malfaiteurs, les histrions.

 

Chacun se campe dans l’excès.

C’est ridicule et pitoyable !

Un match de Catch entre des nains

Dans la cour de récréation !

Vu d’en haut ou vu de très loin

On rit bien fort de ce manichéisme…

Ils ressemblent à quoi ces humains ?

Des bestioles

Enervées comme avant un séisme.

Pitoyables d’excès

Pitoyables et

- c’est vrai ! - tout à fait

ridicules.

 

 

Zen et éblouissance…

 

Pas d’excès ! c’est la voie qui convient.

Le milieu est au centre du tout,

Une zone de calme à l’écart des tempêtes

L’équilibre, la paix,

La mesure ;

Ou la zen-attitude,

La zénitude :

On prend un peu

Ici et là

Un peu, pas trop de tout, partout…

La raison c’est, d’entre les fous,

Une moyenne douce et calme ;

Un chemin tendre comme on dit

Une balade entre les palmes de Padoue ;

Ou, comme en un tableau serein

Et partant de couleurs primaires,

Le peintre crée par ses mélanges

Une harmonie.

 

Le calme blanc,

L’éblouissance

Et l’allégresse…

Pour tous les sens

Une caresse

Une liesse

Et cette suprême conscience

De la Vie…

 

Apprendre à écouter :

Le rire d’un enfant, n’est que promesse d’avenir.

Apprendre à regarder :

Les lueurs, les couleurs d’un soleil au couchant,

Ce sont autant de rêves d’aubes et d’espoirs de soleils levants.

Apprendre à respirer :

Comme une abeille s’enivrer du parfum de toutes les fleurs.

Apprendre à savourer

Le temps qui coule, doucement, sans jamais s’inquiéter de l’heure.

Apprendre à caresser :

Les âmes, les corps et les cœurs

En donnant de son propre cœur,

De son corps, de son âme aussi

Tout ce qu’ils peuvent de douceur et de ferveur

En cette vie.

 

Enfin la joie d’entendre,

Enfin la joie de voir,

De sentir, de goûter,

De chérir…

 

Simplement être

Sans jamais plus

S’inquiéter de devenir.

 

Didascalie : A la fin de chaque quatrain (excepté le dernier), le poème fait ses commentaires ad libitum (à propos de la page blanche, des versets ou déversés, sur l'intelligence des propos et de la "vérité" du 9ème vers, sur Archimède... propositions). Mais le chef d'orchestre impatient, le rappelle à l'ordre en tapant de la baguette sur son pupitre ! Alors la mélodie reprend, impérative...

Le p'tit poèm' stressé :

" - Je suis un p'tit poèm' stressé.
    On m'a fait court ; je suis pressé.
    Je peux juste aller jusqu'en bas
    De la page - et c'est déjà ça ! (ad libitum)

    Moi, mon unique liberté
    C'est un bristol d'un seul côté :
    J'ai le recto pour m'exprimer ;
    Au verso, il y a des versets... (ad libitum)

    ' Quand on est p'tit on n'est pas grand '
    Partant de là, pour exister
    Faut réfléchir avant d' parler
    Et dire un truc intelligent ! (ad libitum)

    Plus que trois centimètres avant
    Le bas d' la page et c'est fini !
    C'est pas beaucoup même en tout p'tit...
    Vite ! une astuce... Ah ! j'ai trouvé ! (ad libitum)

    Il suffit de se terminer
    Tout comme on avait commencé :
    ' Je suis un p'tit poèm' stressé
     On m'a fait court et compressé...' (au 3ème vers en boucle)

Roscanvel, le 5 juin 2006

 

Un escargot, une laitue, un jardinier...

Un escargot lent
Portant sa coquille
Allait prudemment
Vers une Laitue...

Elle avait tout l'temps
- C'était une fille -
Et bavait pourtant
D'envie de laitue...

Oh ! Ah ! Hi ! Quels sont ces cris
Qui m'écorchent les tympans ?
Révolution de Paris
Ou caprices d'un enfant ?

Ce n'est que le jardinier
Qui n'est pas - pas du tout - content
De voir ce qu'il a semé
Convoité par un rampant !

Pour un escargot...
La bête est énorme
Qui brandit au bout d'un bras menaçant
Une bêche ! " - Ô Dieu ! Pitié pour mes cornes

Et mon doux fardeau, mon appartement !"

Rien n'y fait ! le monstre a levé son arme
Et il frappe, frappe, effroyablement...
Le sol tout autour du brouteur en larmes
Et creuse tranchée tout en l'évitant !

"- Holà ! l'escargot! tu veux ma salade ?
Ce n'est pas gagné ! ce n'est pas gagné !
Il va bien falloir que tu escalades
Le petit fossé que je t'ai creusé !"

Ainsi en bonne intelligence,
Hormis qu'ils étaient opposés,
Un escargote, un jardinier,
En dépit de leurs divergences,

Ont bien vécu sans s'écorcher
Sur la même laitue.

                              Je pense

Ainsi qu'il faut nous accepter
Malgré, parfois, nos différences,

Et grâce à elles,

S'apprécier !

Roscanvel, le 08 septembre 2005

 

Tomates-cerises

Ils avaient des tomates-cerises à ne plus trop savoir qu'en faire. Parfois, elles poussaient comme un champignon écarlate, bubon unique sur le bout de leur nez. C'était un moindre mal. Mais ils se tenaient à l'écart du monde, clowns ridicules. D'autres fois, elles leur venaient sous les aisselles, en grappe, et cela les forçait à marcher les bras en l'air. Dans un souci des conventions, ils faisaient mine de voler... Mais toujours les tomates-cerises pesaient, gênant le décollage.

Certains en avaient sous la plante des pieds. Ils roulaient. D'autres encore dans les cheveux, le cervelet, la moelle épinière, et au niveau de troisième cervicale... On les croisait, marchant courbés, comme de vieux plants, la branche basse, rouges de honte et de douleur et de cerises.

Les fées ne voyaient pas ce manège d'un très bon œil. A quoi pouvaient-elles bien servir si les métamorphoses s'opéraient d'elles-mêmes ? On fit la grève des ailes, on manifesta à la baguette. Cela n'eut qu'un seul effet : les tomates-cerises en profitèrent pour proliférer... Elles envahirent les vêtements avec application, puis les appartements, les bars, les bouges, les trottoirs, même les abris-bus...

L'uniforme à la mode était d'un rouge pourpre, un rouge tomate-cerise...

Les fées, désemparées, tapaient d'un pied rageur sur les cohortes tomatières... On vit même quelques anciennes croquer de rage à pleines dents dans cette mêlée démentielle.

C'est ainsi que, totalement par hasard, fut inventé le coulis de tomates, et l'étonnante croque-au-sel qui mit fin au rouge fléau...

Les fées du nouveau monde découvrirent le Ketchup... Mais c'est une autre histoire, sans intérêt majeur...

 

 

L’avancement

L'ambiance était bien tiède. Une buée vinifère opacifiait les sens. L'inspecteur stagiaire entra prudemment sur les lieux du crime. Il concentra d'abord son attention sur la position relative des murs... Rien à dire ; tout semblait à sa place : le plafond plafonnait ; le plancher planchait ; les murs muraient de concert face à face et en silence... Rien à redire à cela...

Pourtant il fut surpris par un détail curieux : il manquait un cadavre ! Or en matière criminelle, c'est une chose indispensable qu'un cadavre. Cela sert l’avancement, entre autre… Sans cadavre pas de meurtre ; sans meurtre pas d'enquête ; sans enquête pas d’inspecteur, pas de femme d’inspecteur, pas d’histoires grivoises sur le joli minois et les dessous coquins des femmes d’inspecteurs, pas de parties de belotes avec les collègues, pas de pastis sur le tapis des cartes, pas de cartes près des verres à pastis, pas de verres, pas de cartes, pas de pastis. Rien de rien. Non ! rien de rien… Et il regrettait tout !

D’un revers de manche rageur, le commissaire chassa l’affreux soupçon de ce néant hypothétique. Il lui fallait trouver un cadavre sans tarder ; un cadavre ou deux… Il se mit en quête, l’attention doublée…

Ca et là, des bouts de carottes, des pelures d'oignons, des épluchures de pommes de terre jonchaient la table de travail. Ce désordre apparent témoignait sans conteste de l'extrême violence des faits. Parmi les détritus qui parsemaient la scène, le commissaire principal nota avec intérêt la présence suspecte de deux couteaux : l’un, économe, au manche réduit, gisait au fond du lavabo, tout maculé d’étranges taches d’amidon. Bizarre bizarre ! bougonna-t-il… L’autre couteau était de belle taille, lame affilée, manche boisé comme un grand fût de sapin clair, et fraîchement lavé…

Bizarre bizarre ! reprit, dans un sourire entendu et altier, le commissaire divisionnaire : cette fois je tiens l’arme du crime ! Mais des deux lames prétendantes, laquelle allait être l’élue ? A défaut de cadavre, il n’est jamais de certitude. Sans certitude, pas de coupable ; pas de coupable, pas de procès ; pas de victoire, pas de lauriers ; pas de photo en première page, pas de discours à l’assemblée, pas de baisers d’admiration de la bourgeoise transportée, pas de réception à l’Élysée, pas de médaille, pas de champagne à l’apéro, pas de petits fours, pas de golf, pas de flûtes… Non ! rien de rien… Et il regrettait tout !

D’un revers de manche rageur, le ministre de l’intérieur chassa l’affreux soupçon de ce néant hypothétique. Il aurait ce cadavre coûte que coûte ; ce cadavre ou ces deux ou ces trois… Il se remit en quête, l’attention triplée…

La plaque de cuisson cuisait par vocation. Il faut un flair de chef d’état pour mâter le fond des marmites… Notre homme s’y intéressa. Enfilant ses gants de parade et son courage à quelques mains, il souleva, comme on démine, un couvercle à l’aspect suspect…

Le Bourguignon de la patronne baignait en morceaux dans son jus.

Ah ! l’avancement…

soir de cafard, un poème : écrit depuis la Recouvrance... Ceux qui m'aiment me reconnaîtront...

Ruiné

Dorénavant, voici ce que je suis...

Belle bâtisse d'homme - autrefois ! -

Aujourd'hui,

Que de ruines

Et lézardes

à ce mur décrépit !

 

Si l'on observe bien, peut-être,

Entre deux pierres,

Une source ténue,

Malgré tout, fait la fière

Et persiste à paraître

A la fois pure et drue

Où n'est rien désormais que misère...

 

Si mince son filet,

Goutte à goutte s'écoute

Et d'un si glauque aspect

Que ce n'est même pas le sang d'un Christ en croix

Mais le pus de ses plaies

Qui suinte ici, bien seul à force d'étouffer

Parmi l'extravagante inanité des lierres...

 

Belle bâtisse d'homme - hélas ! c'était hier ! -

Aujourd'hui, ruine

Et champ de pierres ;

Enfants que, quelquefois poussés par - on ne saura pas - quelle étrange et si vaine pitié,

Certains esthètes curieux

Aiment pourtant, certaines fois - jour déclinant - à visiter.

 

Ruines navrées d'Amer amer,

Et si profondément meurtries, si désolées...

Thierry Cohard 26 juin 2005

 

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Texte de la première partie : (thème : un jardin extraordinaire)

 

Ce serait un jardin de vie

Un jardin extraordinaire

Un peu broussailles

Un peu Versailles

Ni tout à fait près de l’Enfer

Et pas si loin du Paradis.

 

Ce serait un jardin de fleurs

Pas forcément bien ordonnées

Mais de couleurs

Et de senteurs

Quand le sourire et le parfum se voient à la robe accorder

Une promesse de bonheur.

 

Ce serait un jardin mélodieux et charmant

De chants et de bruissements d’ailes

Entre les branches.

Un arbre, on le dirait fleuri de papillons, se penche

Sur une douce procession de coccinelles

Ou bien parmi les perles de rosée nacrées

Sur une éclosion de jolies nymphes en cocons.

 

Ce serait un jardin débordant de tendresse

Où les petites mains des belles jardinières,

Comme tout est amour et douceur en prière,

Prodigueraient à chaque plante sa caresse.

 

Ce serait un jardin de grâce et de beauté

Quand les statues dansant aux miroirs des fontaines,

Pâlit de jalousie la lune souveraine

Et s’en va se cacher, honteusement vexée,

Que quatre Omphales belles en ce jardin d’amour

Aient éclipsé Phoebée !

 

Ce serait un jardin de rires éclatants

Tout espiègle d’enfants et de nains malicieux

Secouant au grelot de leur hilarité

Le printemps que la joie comme un pendant d’oreilles

Réveille en s’accrochant aux clochettes des fleurs.

 

Et fort de tout cela, ce serait à toute heure

Un jardin souriant d’un merveilleux bonheur !

 

Ce serait un jardin de vie

Un jardin extraordinaire

Un peu broussailles

Un peu Versailles

Ni tout à fait près de l’Enfer

Et pas très loin du Paradis.

Thierry Cohard juin 2005

 

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Texte de la deuxième partie : (thème : Roméo et Juliette aujourd'hui)

 

Deux enfants s’aimaient,

L’un à l’autre opposé

Dans le camp de son père.

Quelque fois cependant sur le fumier des guerres

Une rose d’amour éternel est éclose.

 

Deux enfants qui s’aimaient

Chérissaient une rose…

 

- Roméo, Roméo ! Pourquoi es-tu Roméo ?

 

Pourquoi

Parmi les ennemis de ma propre famille

Ai-je trouvé l’Amour !

 

Non… Non ! Ce n’est pas ainsi que la question se pose !

 

Etant donné l’Amour

Y a-t-il quelque chose

De plus grand, de plus urgent, de plus important…

De plus pur…

Qui interdirait sur-le-champ aux amants

De se donner l’un à l’autre éperdument ?

Sont-ils sûrs,

Roméo, que l’orgueil ou la haine

Vaille vraiment ce prix ?

Ou n’ont-ils rien compris ?

 

Je t’aime

A l’infini

N’en déplaise à ce monde…

 

Nos deux camps,

Nos deux clans,

Peuvent bien se dresser

Si violemment

L’un contre l’autre…

 

Roméo, notre élan

Est tout entier d’Amour

Et de tendresse

L’un pour l’autre.

 

Ceux qui s’aiment sont sans secours

Sous les pattes griffues de la guerre.

Comment protéger notre Amour

Quand le monstre alentour

Remplit à larges pelletées les cimetières ?

Quand la violence rend le monde aveugle et sourd ?

 

La moindre joie :

Rires d’enfants,

Jeux amoureux d’adolescents,

Sourires échangés, caresses, chants et danses,

Aux mariages et nouvelles naissances,

 

Tout ce qui fait enfin, la saveur de la vie

Et lui donne son sens,

Tout cela,

Ici-bas

Par un feu de démence

Est détruit.

 

Sommes-nous bien à notre place, en ce tumulte, ô Roméo !

Faut-il attendre ?

Nous faut-il ensemble Espérer ?

 

Et pourquoi pas ?

 

Autant d’Amour donné

Ne peut être gâché !

 

Forcément

Les amants

Se retrouvent ailleurs

Où s’aimer est plus doux

Où n’est plus de fureur…

 

Fermons les yeux ensemble !

Ensemble nous serons

Demain

Dans cet ailleurs

Quand éternellement

En éternels amants

Et nos mains

Et nos cœurs

Enfin

Ne feront qu’un.

Thierry Cohard juin 2005

 

 

Mer et Paix : (Brest 2004)
Ecouter le texte en voix et en musique (format MP3, 5 Mo)
pour le télécharger : clic droit sur le lien et enregistrer la cible sous...

 

C’était en 2004 et la Mer attendait,

Etale sur la grève,

Des nouvelles des hommes.

Elle rongeait son frein,

Inquiet métronome

Au long pied des falaises.

Elle avait l’œil gris bleu,

Vert sévère parfois

Comme ont toutes les mères

Quand leurs enfants ont froid.

Elle avait l’œil gris bleu,

Comme se désespèrent

Des frasques des enfants

Certaines fois les mères.

La Mer avait le vague à l’âme :

Tant et tant de tonnerre et de bruit chez les hommes !

Si peu de paix semée dans le jardin des drames,

Si peu de paix germée sous le terreau des larmes…

Les économes, les stratèges,

Régnaient alors en potentats

Et il n’était soleil ni neige

Qu’ils ne fassent pas.

Entre flux et reflux, hésitante, et tantôt

Basse et quelque fois pleine,

La Mer était de guerre lasse

Et ne supportait plus la haine.

C’était en 2004 et la Mer attendait,

Etale sur la grève,

Des nouvelles des hommes.

Elle rongeait son frein,

Inquiet métronome

Au long pied des falaises.

Alors un enfant vint,

C’était en 2004.

C’était un tout petit enfant

Malingre au teint d’albâtre,

Un enfant noir couleur d’ébène,

Un enfant de crème citron,

De caramel,

Un bel enfant de sucre d’orge et de bonbon ;

Un enfant grand comme le sont

Tous les enfants parmi les hommes.

Dans ses yeux des reflets gris-bleus,

Puisque la mer se plaît en somme

A n’être qu’un miroir du ciel,

Etincelaient.

Et du père il avait conservé l’essentiel :

Amour et Paix.

Il était né sur les deux rives du Jourdain

Entre Israël et Palestine

Et il ne comprenait pas bien

Toutes ces luttes intestines

Il était né en Tchétchénie

Des affres de la Liberté

Mais il n’avait d’autre patrie

Que l’Homme en son humanité.

Ô petit être, frêle esquif,

A la mer tu confies ton rêve…

Qu’un vent d’amour définitif

Enfin se lève…

Il était né dans le Darfour

Où cuit perfidement l’horreur

Quand l’indifférence rend sourds

Les petits marchands de petits bonheurs.

Il était né en Colombie,

Au Pakistan, Afghanistan, en Irak et en Algérie…

Il était né partout

Où l’Espérance et le Bonheur saignent des coups

Que l’on porte à la Paix …

Flots de sang déversés contre vents et marées,

Voiles et croix, voilés, croisées.

Partout la haine et partout, la rivalité…

Ô petit d’Homme, frêle esquif,

A la mer tu confies ton rêve…

Qu’un vent d’amour définitif

Malgré la honte enfin se lève…

Il était né pauvre mais honnête,

Il était né riche mais charitable ;

Il était né savant et à tous il savait simplement expliquer ;

Il était ignorant mais jamais il n’était en défaut d’écouter.

Et il se tenait là devant la mer désespérée

Enfant d’un jour, prince toujours…

C’était en 2004 et la mer attendait,

Etale sur la grève,

Des nouvelles des hommes…

Il lui en apportait ;

Elles n’étaient pas bonnes…

" Il n’y a rien à faire ", dit la Mer.

- " Au contraire ", répondit l’enfant

Et comme il s’asseyait doucement sur la grève

Il avait dans les yeux les couleurs de son rêve,

Et il tenait entre ses mains,

Tous les outils de son destin.

Alors il prit à pleines paumes des poignées de petits cailloux

Dans le coffre à bijoux de l’estran

Et les lança en ricochets sur le tapis de l’océan.

Il disait des mots, je tairai lesquels,

Car ne peut être écrit,

Ce qui au compte de chacun sera repris

Car ne peut-être gardé prisonnier

L’oiseau dont la nature est de voler pour mieux chanter la liberté.

Il disait des mots et par magie

Tout aussitôt,

Il poussait des ailes aux petits cailloux

Des ailes ou des voiles plutôt…

Des ailes ou des voiles surtout…

C’était en 2004

Et ces cailloux ailés, toilés,

Cailloux zélés,

Au vent de l’Espoir

Au miroir de l’eau

Se changèrent bientôt en bateaux.

Et l’on vit, sur la mer,

Désormais rassurée,

Une immense armada,

Non par guerre levée

Mais battant pavillon de Paix

Et qui filait,

Tous horizons,

Vers tous les hommes

De la terre…

Et qui filait,

Tous horizons,

Vers tous les artisans de Paix

Thierry Cohard (Paray-le-Monial, juillet 2004) 

 

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Voilà comment j'écris

Tout autour de moi les images flottent,

Rêves légers en suspension dans la nuit bleue.

Il en est des filantes, fulgurantes

Et que l’on saisit peu ;

Mais d’autres, moins farouches

Et surtout plus sensibles à ma commune touche,

Ribambellent en bandes irrépressiblement ;

Tant et si bien qu’il me suffit d’en piocher une

Pour que tombent ensembles toutes les autres attachées.

Car toujours, quelque part, ce monde nous complote

Un joli tour de mots

Que je vous écrirai bientôt…

Alors je lance en l’air un premier trait d’esprit,

Une ligne légère,

Avec au bout son vers,

Et l’onde allant ainsi chatouiller les images,

Il m’en tombe à poignées

Plus que je n’en voulais…

A présent il me faut trier.

C’est épuisant et c’est frustrant aussi

Car les images écartées sur le moment

Ont de la peine, infiniment,

Et quelquefois,

Elles s’éteignent ou bien s’éloignent pesamment…

Moi qui ai bien passé plus de temps sous la lune

A rêver éveillé qu’à dormir,

Moi je n’ai jamais pu en ramener aucune

Et de cela je porte un deuil qui me déchire.

Revenons donc à nos images

Enfin triées sur le papier :

Ensuite il faut les structurer.

Mais à ce jeu, le plus souvent,

Elles s’arrangent d’elles-mêmes

Et s’organisent pour se placer

Sur le chantier de mon poème

Par délicate affinité.

Quand je relis, à chaque fois, une belle et fluette idée

Frappe à la porte de mon cœur en s’écriant : "  Et moi ? et moi ! "

Et de l’entendre ainsi me supplier,

D’entendre larmoyer cette petite voix,

Tout en émoi, je m’aperçois

Que bon sang mais bien sûr je l’avais oubliée !

Je l’intègre alors sur ma feuille comme je peux :

Forcément ça fait des ratures, des étranges funiculaires,

De surprenants téléphériques qui se croisent,

Hiéroglyphes abscons sur mon papier brouillon !

Même un jour, une nuit,

Les images s’étaient tellement emmêlées

Que je n’ai jamais pu relire mes écrits…

Or je sais, pour avoir percé d’autres secrets,

Que depuis ces rebelles se contentent ainsi

De désordre et d’oubli,

Et se moquent en chœur de ma déconfiture

En se remémorant comment en cette nuit

Le pêcheur empêché s’était lui-même pris

Dans les lacs du filet qu’il avait d’aventure

Jeté dans l’océan des petites idées…

Voilà comment j’écris :

C’est un jeu, un bonheur,

Une complicité, un bel emballement d’images, un safari,

Dont le chasseur n’est pas à coup sûr le vainqueur

Mais dont il restera à jamais ébloui.

Voilà comment j’écris

Et voilà bien pourquoi

Chaque nuit

Tout un ciel

Enamouré d’images belles

Me sourit.

 

Pont-de-Buis Thierry COHARD, le 18 décembre 2004

 

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