Avec des Si...

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Chateaulin le 10 août 2006,

 

Avec des si...

spectacle de rue

par "Les Dits de la Nuit"

(voir la vidéo : cliquez sur la photo*)

 

* Attention c'est lourd ! 17 Mo pour 11 mn !
Même pas en rêve sans ADSL !

télécharger la vidéo (11 mn = 17 Mo)

Il est 22H. Le soleil se couche.

Place du marché, les lampadaires s'éveillent en même temps que les étoiles.
Au coin de la rue, une bande de jeunes fait vrombir ses motobylettes comme des gros bourdons bien lourds, pour emmerder le quartier et jouer à "si-on-disait-qu'on-avait-des-grosses-cylindrées" sur leurs ridicules petites bécanes...

Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ?

- Que c'est la jeunesse d'aujourd'hui ? Rien sous le casque, quand elle en a, et le neurone sous la pédale, s'il en est un ?

Eh bien non ! A quelques mètres de la pétarade, la jeunesse d'aujourd'hui, la vraie, la bonne, la celle-que-j'aime, elle s'éclate à créer un spectacle de rue et à le faire tourner partout en France pendant l'été, avec trois francs six sous, un réchaud de fortune et des gobelets en plastique !

Donc, à Chateaulin ce soir-là !

"Les Dits de la Nuit", ce sont six nanas super, des Ladies on vous dit. Des étudiantes passionnées. Elles ont écrit le texte, elles l'ont mis en scène. Et puis hardi petit pour la tournée-vacances ! Un coup de fil aux mairies : l'animation en échange du camping gratuit ! A ce tarif-là les mairies sont gagnantes... Une seule petite voiture pour les accessoires (c'est à peine si on peut faire entrer le chauffeur !) ; les autres, en train, sur les longues distances, et puis en stop de ville en ville une fois arrivées dans le département. C'est ainsi que la troupe a fait Camaret, Saint-Nic, Chateaulin en quelques jours avant mettre le cap pour le festival d'Aurillac, le 19 août.

C'est l'histoire d'un petit cordonnier des rues (Laure), spécialisé dans la godasse en tous genres et humaniste. "Avec des si" et la participation du public, elle va faire vivre pour nous des rencontres imaginaires entre les personnages qui l'ont le plus marqué : la danseuse à la carrière brisée (Amandine), le marionnettiste qui ne disait jamais rien (Karine), la cantinière de rue au milles recettes de passage (Flore), la naufragée qui parcourt le monde à la recherche des propriétaires des objets qu'elle a récupérés (Elsa)...

Or chaque fois, c'est le public qui choisit, qui va rencontrer qui, et dans quel ordre. Un petit dénombrement de base : ça fait 3 combinaisons possibles. Ce qui entraîne 6 textes, deux à deux. Ca n'a l'air de rien mais c'est une belle prise de risque qui force les comédiennes à adapter l'histoire à la situation. Ajoutez à cela un petite dose d'improvisation (la naufragée cherche les survivants parmi le public) et vous aurez sous les yeux un théâtre plus audacieux encore que celui de Jean Villard : CE THEATRE INTERACTIF, D'IMPROVISATION ET A TIROIRS que je réclame depuis des années parce qu'il est selon moi le seul et valable avenir du théâtre moderne ! (loin, bien loin, de l'autre côté du théâtre vulgaire et facile de la nudité sur scène, du théâtre de la gesticulation sans mots et sans histoire qui sont le grand snobisme de ces misérables créateurs contemporains...)

Alors ce soir-là, à Chateaulin, Mado la Cantinière a rencontré la naufragée. Et Maëlle, la marionnettiste a valsé avec Anna, la danseuse.

Spectacle riche d'émotions aussi pour les yeux, les oreilles : pour le rêve de l'âme. Cordes de feu, jonglage, mime et enfin musique : de l'accordéon à la guitare en passant par la trompette et la flûte traversière, et des chants vraiment entraînants (en particulier l'émouvante chanson de Gainsbourg, "Accordéon" interprétée en 1962 par Juliette Gréco).

A la fin, la casquette passe. Le public donne ce qu'il veut, s'il le veut, on ne l'agresse pas : c'est lui qui vient à la casquette. Juste en passant, comme ça, pour dire : il y a bien des soirs, en sortant des grandes scènes nationales on se demande bien pourquoi on a payé le billet et perdu sa soirée. Ben ! là non ! c'était que du bonheur ! Soirée gagnée et un petit luxe de plaisir !

Et c'est pas fini ! Mado (Flore) nous a concocté un thé au lait bien épicé qu'elle offre dans des petits gobelets à qui veut bien goûter. Après la vue et l'ouïe, il ne manquait que le goût et l'odorat. Eh bien ! les voilà ! Pour les frissons, on est déjà totalement servi par le spectacle. Et puis le livre d'or circule sur lequel chacun peut écrire un mot, en particulier une nouvelle recette pour Mado. Car c'est la rencontre qui est au cœur des "Dits de la Nuit" et elles le prouvent encore. Nous, avec Adrien (oui ! oui ! il était là ! Fidèle au poste ! le matelot !) on a mis la recette de la patate chaude - je sais, on peut mieux faire !

Alors on a discuté avec les 6 ladies pendant le thé. Après on est allé boire un pot ensemble, au Cactus (patron tout seul un peu débordé mais sympa). On a même mangé des chiens-chauds et une pizza mais pas assez vu que le congélo du Cactus était en fin d'été, et nos ladies en faim de tournée... N'importe ! et quelques verres de punch, avec modération, on te vous refaisait le monde.

Vous voulez que je vous dise ?

Ce qui est encore plus sympa c'est de voir que la philosophie du spectacle (la rencontre est enrichissante !) se confirme dans les faits. Y en a pas une qui a démenti ce qu'elle avait joué sur scène ! Des vraies nanas, super nanas, y a pas d'embrouille !

- Karine (cordes de feu, marionnette) se destine à l'organisation de spectacles (formation à Angers)

- Flore (trompette, guitare, tambouille et feu ; auteur ; études de lettres) est partie à Montréal pour y étudier les poètes canadiens de langue française.

- Amandine (Chant, danse et flûte traversière) travaille le stylisme et la communication visuelle. Son papa est poète et nouvelliste. Elle se pose beaucoup de questions sur les principes de l'édition contemporaine, et elle a bien raison. Mais il ne faut pas désespérer : les dinosaures de l'édition finiront bien par quitter la place. Alors le livre, qui en leur temps n'était que marketing, redeviendra la souffle du rêve qu'il est par nature pour le bonheur de ceux qui croient en l'imagination...

- Elsa (la naufragée) va entreprendre des études de scénographe à Rennes. Elle rêve de faire un stage avec Ze Pipo Delbono. Très bon choix !

- La seconde Elsa, qui n'a pas joué la comédie, mais "seulement" de la machine à coudre (costumière) et de la flûte traversière, a un humour bien décapant à la Desproges qui nous fait regretter de ne pas l'avoir vue en scène...

- Quant à Laure (vraie voix et vraie prestance de comédienne, le cordonnier ; jonglage, saxophone et cracheuse de feu ; des études de communication visuelle aussi du côté de Valence), il paraîtrait qu'elle se la joue façon Lara Croft quelque part sur un site inconnu... Nouveau boulot top-secret ! Mais je ne vous ai rien dit !

Voilà ! Les Dits de la Nuits, c'est ça : de multiples cordes à leur arc, de l'enthousiasme, de l'audace ; une philosophie altruiste et humaniste ; et - on imagine qu'elles l'ont bien pensé - LE VRAI THEATRE DU DANGER que j'aime, celui où l'acteur prend tout son sens, sans rien ôter au texte ! Un théâtre participatif, interactif et d'improvisation, un théâtre audacieux, où le public a toute sa part. Un théâtre des sens et de l'humanité. Un théâtre du sens et de l'inventivité !

Elles se sont séparées pour leurs études, un temps, dans le vaste monde. Mais ce faisant elles vont grandir.
Et pour notre plaisir on les retrouvera ! Géniales !

Thierry Cohard                 

 

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